Tormented Souls II, sorti en octobre 2025 sur PC, PlayStation 5 et Xbox Series X|S, renoue avec la tradition du survival horror classique, s’adressant directement aux nostalgiques de Resident Evil et Silent Hill. Développé par Dual Effect, le titre conserve l’essence horrifique du premier épisode tout en amplifiant son ambition visuelle et ludique. Ce deuxième volet parvient à conjuguer hommage, respect du rétro et savoir-faire moderne, tout en restant fidèle à une formule redoutablement exigeante.

Une intrigue gothique et suffocante
Le jeu reprend Caroline Walker, héroïne du premier opus, quelques mois après les événements passés à l’hôpital de Winterlake. Sa sœur Anna, victime de crises de démence et de visions infernales, pousse les deux femmes à se rendre à la Villa Hess, un couvent reculé où une mystérieuse congrégation promet le salut. Sans surprise, ce sanctuaire cache un nouveau cauchemar : Anna disparaît, Caroline se réveille torturée, et un culte occulte s’éveille dans les ombres. Dès les premières minutes, Tormented Souls II plonge le joueur dans une oppression sensorielle quasi constante — bruits inquiétants, respirations dans les couloirs, portes qui grincent et murs boisés baignés de sang.
Une esthétique à l’ancienne, brillamment exécutée
Le cœur de l’atmosphère tient à la direction artistique : décors décadents, lumière chiaroscuro et architecture gothique sont sublimés par un éclairage dynamique digne des premiers Resident Evil mais modernisé. Les environnements, variés et méticuleusement composés — couvent, boucherie, cimetière, égouts, gare abandonnée — évoquent tour à tour le spleen visuel d’un film de Carpenter ou d’un tableau de Caravage. Chaque lieu respire la décrépitude et l’angoisse ; même lorsqu’il semble vide, le moindre couloir donne le sentiment d’être observé
Le jeu excelle dans son utilisation des caméras fixes. Comme dans les classiques du genre, elles limitent le champ de vision pour renforcer la tension dramatique. Les angles étroits et les cadrages alambiqués exploitent la peur de l’inconnu : souvent, le danger vient de ce que l’on devine plus que de ce que l’on voit. La composition du son y participe pleinement : le moindre bruit métallique, le crissement d’une porte ou une respiration lointaine suffisent à glacer le sang : une réussite en termes de sound design.
Gameplay et ADN survival horror
Tormented Souls II ne cherche jamais à faciliter la vie du joueur. Son gameplay rigide revendique une lenteur assumée : déplacements pesants, visée automatique capricieuse, interactions précises au millimètre. C’est à la fois frustrant et fascinant : chaque réussite — résoudre une énigme, survivre à un combat — se mérite. La gestion des ressources rappelle l’âge d’or du genre : munitions limitées, soins rares, sauvegardes possibles uniquement à l’aide de cassettes. Rien n’est automatique, et la moindre erreur peut coûter vingt minutes de progrès
L’arsenal, bien que restreint, s’avère jouissif : le fusil à pompe et l’arbalète font leur retour, mais la tronçonneuse s’impose comme un ajout marquant. Son utilisation, violente et cathartique, souligne un thème cher à la série : la frontière floue entre l’héroïne et les monstres qu’elle affronte. En revanche, la résistance des ennemis peut paraître excessive : il faut parfois quatre ou cinq clous pour abattre une créature standard, forçant à la prudence ou à la fuite.
Les énigmes, moteur intellectuel du jeu
Les puzzles constituent la meilleure facette du titre. Dual Effect a peaufiné leur conception : difficile, mais jamais gratuite. Certaines demandent de véritables sauts de logique et une observation méticuleuse : tourner dans un décor pour repérer un détail manqué, manipuler des symboles religieux ou traverser des réalités parallèles. Chaque solution procurera une satisfaction rare, celle d’avoir déjoué un système complexe et cohérent. Ce niveau d’attention rend la progression exigeante, parfois laborieuse, mais profondément gratifiante.
Réalisation et technique
Sur le plan technique, Tormented Souls II montre des progrès notables par rapport à son prédécesseur. Les textures et effets de lumière sont largement supérieurs, et la stabilité est exemplaire sur PlayStation 5 et PC. En revanche, les cinématiques accusent encore quelques faiblesses : animations sommaires, visages figés, doublages parfois maladroits. Rien qui ne brise l’immersion, mais des défauts visibles pour les amateurs d’esthétique moderne. Le moteur Unity, bien exploité, permet tout de même un rendu bluffant de profondeur et de contraste.
Une expérience d’angoisse pure
Tormented Souls II est avant tout un hommage à la peur organique. Là où les productions AAA contemporaines misent sur le spectaculaire et les jumpscares, celui-ci prône l’épouvante psychologique, la solitude et la lenteur. L’ambiance visuelle se marie parfaitement à une bande-son quasi muette, où le silence devient un outil narratif. Le résultat est une expérience sensorielle étouffante, qui s’adresse à ceux qui aiment souffrir volontairement pour ressentir la tension authentique du survival horror.
Une durée de vie satisfaisante
Comptez une quinzaine d’heures pour boucler le jeu, un bon équilibre entre densité et rythme. Les allers-retours nombreux peuvent fatiguer, mais sont inhérents à la structure labyrinthique du genre : chaque passage débloqué ou raccourci découvert procure une satisfaction proche du level design des Resident Evil originaux. De surcroît, la rejouabilité est stimulée par quelques variantes de dialogues et des costumes alternatifs cachés.
Fidélité et modernité : un équilibre fragile mais réussi
Le studio Dual Effect démontre une fois encore qu’il sait manier ses influences avec respect. Là où Tormented Souls premier du nom empruntait avec ferveur sans toujours trouver son souffle, cette suite en maîtrise désormais les codes : elle intègre les hommages sans les copier. Le jeu s’assume comme une relecture plutôt qu’une simple imitation ; il est lent, impitoyable, parfois frustrant, mais profondément cohérent dans sa vision du survival horror d’antan : lourd, tactique, et poisseux
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Verdict
Tormented Souls II est un hommage pur, une œuvre qui refuse la facilité et célèbre l’héritage du genre avec une sincérité désarmante. On y retrouve la peur brute, la satisfaction du dépassement et la tension des années 1990, remises au goût du jour avec une patte artistique affirmée. Malgré ses angles maladroits et sa rigidité, il s’impose comme l’un des meilleurs survival horror indépendants de 2025 : exigeant, profond, et d’une noirceur somptueuse.















